10 juillet 2013

BOLIVIE : Lipez

Après le Salar d’Uyuni, nous hésitons quant à la suite de l’itinéraire. Le Lipez, au sud-ouest du pays, offre paraît-il de superbes paysages. Cela veut dire près de 500 km de pistes parfois difficiles et pour nous qui ne recherchons pas la difficulté cela fait beaucoup. Mais les informations recueillies sur la beauté des paysages et sur la faisabilité des pistes nous poussent à tenter le coup.
 
Au départ d’Uyuni, bonne surprise: la piste est très roulante, et à part quelques zones de travaux sableuses les 150 premiers kilomètres (jusqu’à Villa Alota), sont avalés très rapidement. Nous commençons à nous dire que finalement il ne fallait pas hésiter.
 
A Villa Alota, il faut bifurquer vers le sud, et la piste est moins bonne, mais surtout après trois kilomètres un gué nous barre la route. Il y a bien un pont tout neuf à 100 m mais il n’est pas encore raccordé. Ce gué est court (15 m) mais ce qui nous inquiète c’est de voir que les lamas qui barbotent au milieu du gué ont de l’eau jusqu’au dessus des ‘genoux’ !

Bolivie-Lipez (gué aux lamas)

Nous tournons un peu aux alentours à la recherche d’une autre solution, mais il n’y en a pas. Nous hésitons sur la conduite à tenir (tenter ? rebrousser chemin ?) lorsqu’un 4x4 touristique arrive et franchit le gué. Cela confirme (malheureusement !) la profondeur et montre en plus que le fond est irrégulier, fait de gros cailloux. Nous demandons au chauffeur de bien vouloir attendre  pour nous aider si jamais nous nous plantons, ce qu’il accepte gentiment. Et nous y allons. Daou, plonge, rebondit, éclabousse mais passe. OUF !
 
La piste monte ensuite sur un plateau à un peu plus de 4000 m. Au moins ici nous ne risquons pas d’avoir de gué. Mais de la tôle ondulée si ! Que ce soit sur du sable, du gravier, de la terre, cette satanée tôle est omniprésente.

Bolivie-Lipez (tôle)

La solution avec un véhicule léger est de rouler vite (60 km/h minimum), ce que font les 4x4, en soulevant des nuages de poussière. Mais avec une maison, c’est trop risqué, le moindre trou pouvant causer des dégâts (nous l’avions appris en Namibie, les amortisseurs avant ayant littéralement explosé sur une saignée, projetant leur huile partout). Il ne reste donc qu’à rouler à 20 km/h si on ne veut pas casser ou se retrouver parkinsonien.

Mais un bruit revient régulièrement. Il n’est pas nouveau, et depuis plusieurs semaines, nous avons cherché la cause, sans la trouver. Mais aujourd’hui il s’amplifie. Nous nous arrêtons donc pour une petite séance de mécanique à plus de 4000 m.

Bolivie-Lipez (mécanique à +4000 m)

Démontage de roue, du frein, rien à signaler. Nous repartons donc. Mais le bruit s’amplifie encore. Re-arrêt. Et là, horreur, nous découvrons que l’adaptateur permettant de démonter l’écrou antivol de roues n’est plus là. Nous l‘avons oublié sur la roue en quittant l’arrêt précédent, et sans lui impossible de démonter les roues !
Demi-tour, piste, tôle, et retour à l’endroit de l’oubli. Rien par terre. Nous marchons alors en suivant les traces de pneus pendant une demie-heure et soudain, miracle, nous le trouvons. OUF ! 
 
Mais il faut absolument trouver la cause du problème, donc nouvelle séance de mécanique, toujours à 4000 m. C’est en fait le boulon de fixation du triangle inférieur de suspension qui est en train de se sauver, et c’est tout l’ensemble suspension-triangle-roue qui bouge! Nous n’osons imaginer la catastrophe si le boulon était parti. Serrage, roulage, plus de bruit, moins de vibrations. OUF !
 
Le soleil va bientôt se coucher, nous avons fait 200 km de pistes et eu suffisamment d’émotions pour aujourd’hui. Arrêt au milieu de nulle part, une bonne douche, un bon repas, chauffage en marche (dehors il fait 0°C à 20:00), la nuit sera calme.

Bolivie-Lipez (repos mérité)

Le lendemain il fait -12°C dehors au réveil mais le chauffage cellule a tourné toute la nuit pour maintenir 13-14°C dans la cellule et, comme tous les jours, le soleil brille et réchauffe vite. On fait ensuite tourner le chauffage moteur (Webasto) une petite demie-heure si bien que le moteur est chaud quand on actionne le démarreur. Daou démarre alors instantanément, ce qui évite de vider la batterie déjà affaiblie par le froid et réduit l’usure moteur. 
 
Nous reprenons la piste, suivant les indications (points GPS) d'autres voyageurs, et optons après Villa Mar pour la piste de gauche, grand détour permettant d’éviter une montée signalée comme ‘dangereuse’ sur la piste principale.
Nous nous retrouvons sur des pistes étroites, sableuses, caillouteuses. Nous montons, descendons, passons des gués, faisons par moment du trial. Nous jonglons aussi avec les ornières creusées par les 4x4, si  profondes qu’il nous faut faire l’équilibriste pour rester sur les ‘crêtes’. Pendant tout ce temps, pas âme qui vive, pas un véhicule. A 4000 m, avec des nuits froides et à plusieurs dizaines de kilomètres du premier village, ce n’est pas le moment de casser. Les difficultés nous préoccupent tellement que ce n’est pas une partie de plaisir et que nous ne profitons pas vraiment des paysages.
 
Enfin nous atteignons l’entrée du Parque Eduardo Avaroa qui couvre tout le sud-ouest de la Bolivie et où se trouve les sites remarquables. Nous soufflons un peu d’autant plus que la piste a été raclée et est donc plus reposante.

Bolivie-Lipez


Mais il était dit que rien ne serait facile et après 5 km la bonne piste cesse et un long gué se présente. Un camion passe, nous en profitons pour regarder et voyons que le fond est stable et régulier. Mais ce gué fait environ 80 m de long et 50 cm de profondeur au milieu ! Cependant nous n’avons plus le choix, pas question de rebrousser chemin, il faut aller de l’avant. Et Daou y va de son ‘plouf’, avec des éclaboussures jusque sur le pare-brise.
Dix kilomètres de tôle plus loin, au village de Quetena Chico, il faut bifurquer pour rejoindre la ‘Laguna Colorada’. Une demie-heure de grimpette et 10 km plus loin, gros problème. Une zone de sable mou en montée suivie d’un raidillon de 100 m, très raide et surtout défoncé. Par endroit ce sont de véritables marches. Cette fois, nous ne jouons plus et décidons de faire demi-tour. Tant pis pour la Laguna Colorada.
 
Mais à Quetena Chico, une seule autre option: une montée vers un col à 4700 m qui permettra de rejoindre la piste ‘normale’ via le salar de Chalviri. Fatigués, nous nous arrêtons pour la nuit en bord de piste, en regardant ce qui nous attend et lorsqu’un 4x4 passe nous le suivons aux jumelles: ce n’est pas réjouissant. Mais encore une fois, une bonne douche, un bon repas, demain sera un autre jour.
 
Troisième jour, il fait encore plus froid (-14°C au réveil) et après quelques exercices d’assouplissement au soleil (et -10°C), nous partons de bonne heure vers cette montée. Ce que nous n’avions pas prévu c’est qu’avant il y a un gué. Long (50 m), assez profond (50 cm), très irrégulier et gelé ! Nous faisons du repérage,

Bolivie-Lipez (gué gelé 1)-1

jetons de grosses pierres pour casser la glace, et alea jacta est. Dans un nuage de fumée noire (la faute aux 4200 m) Daou se met en 4x4, plonge, rebondit, glisse sur la glace, re-plonge, et sort vainqueur !

Bolivie-Lipez (gué gelé 1)-2
 
            
Bolivie-Lipez (gué gelé 1)-3
                  
Bolivie-Lipez (gué gelé 1)-4

 















Au passage, la grille plastique qui protège le bas du radiateur est arrachée mais le radiateur a résisté aux glaçons. OUF !

Bolivie-Lipez (après gué gelé)

Cinq minutes plus tard, un autre gué, petit frère du précédent:

Bolivie-Lipez (gué gelé 2)

Là ce n’est plus drôle du tout. Re-repérage, re-cassage de glace. Heureusement s’il est plus long (80-100 m) il est un peu moins profond (30-40 cm) et le fond est plus régulier (moins irrégulier ?). Une fois encore grâce à son 4x4 Daou sort vainqueur, et nous un peu essouflés car à cette altitude le moindre effort se ressent.
Et inquiets, car la montée est désormais visible, et ça ne nous réjouit pas. C’est à ce moment qu’un 4x4 touristique arrive. Nous discutons avec le chauffeur et les passagers, leur demandant d’ouvrir la route en nous attendant, au cas où nous aurions un problème, ce qu’ils acceptent. Car cette montée, caillouteuse et à voie unique, fait 4 km avec 400 m de dénivelé (soit 10% de moyenne), avec un sommet à 4740 m. Nous l’attaquons avec une obsession: interdiction de s’arrêter, car étant données la pente et la poussivité des démarrages en altitude, il nous serait totalement impossible de repartir !
En première, un peu en seconde, nous grimpons, puis la pente s’accentue et c’est en première, en maintenant le moteur à 3000 t/mn pour qu’il ne perde pas de puissance, que nous allons jusqu’au col.
LOOONGUES minutes !    OUF !
 
Et désormais, aussi incroyable que cela paraisse, nous sommes sur des pistes larges, fréquentées, faciles, en légère descente, avec des paysages grandioses. 

Bolivie-Lipez (laguna Hedionda)

Nous savourons enfin: lagunes salées gelées, étendues où on fait seul sa trace, salar, puis nous rejoignons la piste principale (que nous n’aurions jamais dû quitter) et cerise sur le gâteau, arrivons aux Termas de Polques.
Cette petite piscine d’eau à 40°C avec une vue exceptionnelle sur la lagune de Chalviri aux multiples couleurs et sur les volcans voisins tout aussi jolis est exactement ce qu’il nous fallait et nous y trempons longtemps, chassant la fatigue des derniers jours. Le pied !

Bolivie-Lipez (termas Polques)

Mais la Bolivie nous réserve toujours des surprises, et nous apprenons que le col menant à la frontière est fermée. Pas bon pour le moral. Mais deux heures plus tard, des véhicules arrivent, le col est ouvert. OUF ! Et ce soir, nouvelle surprise, c’est le chauffage cellule qui refuse de fonctionner; nous nous couchons donc avec chaussettes, pyjamas chauds, couette, duvet. Et bien nous en prend car au réveil, il fait -16°C dehors (et -5°C à l’intérieur). Heureusement le Webasto démarre tous les jours du premier coup, et tourne parfaitement, quelle que soit l’altitude. Il est temps de sortir d’ici !
 
Mais auparavant il faut reprendre la piste (la ‘normale’) vers le nord pour aller faire la douane qui se trouve dans une usine chimique utilisant l’eau des sources et geysers pour fabriquer des acides (sulfurique, ...). Trente kilomètres de bonne piste nous mènent à la douane la plus haute du monde (5065 m),

Bolivie-Lipez (douane 5064 m)

 
avec son terrain de foot à 5020 m !

Bolivie-Lipez (terrain foot 5020 m)

Puis demi-tour et plein sud vers la frontière, après un nouvel arrêt-trempette dans l’eau chaude (c’est trop bien !). Paysages somptueux, couleurs incroyables,

Bolivie-Lipez (laguna verde)
  
espaces démesurés, chacal et vigognes qui se promènent.

Bolivie-Lipez (vigogne)

Mais la Bolivie a décidé de souffler le chaud et froid jusqu’au bout. A la frontière, personne, et comme on nous a dit que sans tampon de sortie bolivien les chiliens nous refouleraient, nous sommes coincés, dans la neige, sans chauffage, à 4500 m.

Bolivie-Lipez (frontière)

Demi-tour pour rejoindre, à 7 km, les gardes du parc qui, sympas, nous demandent d’attendre la vacation radio (pas de téléphone ici) durant laquelle ils s’informent. Résultat: il y a aura quelqu’un à la ‘Migracion’ après-demain !
Trop tard pour rouler (il fait presque nuit) nous passons donc une nouvelle nuit froide ici, au pied du volcan Licancabur. Mais pas question d’attendre deux jours, aussi le lendemain, nous décidons d’entrer au Chili (pas de contrôle au col, ils se font à San Pedro) et descendons dans la vallée, à San Pedro de Acatama, à 2400 m, pour attendre dans des températures plus clémentes. La descente est facile: une route quasiment droite qui passe de 4600 m à 2400 m,

Chili-San Pedro r(efuge)

avec vingt (!) refuges d’urgence pour poids-lourds en manque de frein.

Chili-San Pedro (descente)

Et c’est dans cette descente que le voyant rouge de frein s’allume ! Arrêt, contrôle visuel, thermique et olfactif des freins, du liquide, tout à l’air bon, et après deux minutes le voyant s’éteint...pour se rallumer. Et ainsi de suite. Par précaution, nous descendons donc tout au pas, en première, en utilisant les freins au minimum. En fait il s’avérera que cela vient du bocal de liquide de frein plein à moitié: dans les descentes raides, un coup de frein et la sonde située à l’arrière n’est plus immergée et lance l’alarme. OUF !
 
Nous n’avons plus qu’à passer devant la police chilienne sans nous arrêter, nous faire discret 24h, et remonter à la frontière le lendemain. Là de nombreux 4x4 touristiques attendent aussi l’employé de la Migracion ......... qui ne viendra jamais !
 
Re-descente, et à notre grand soulagement, les policiers chiliens tamponnent nos passeports sans se soucier de l’absence de tampon bolivien. OUF !
 
 
 
 
 

1 commentaire:


  1. bonjour,


    je suis très admiratif de ce que vous faites, Jean-Yves est vraiment un as de la mécanique .


    bonne route


    j-noël


     

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